Adrienne Bolland, femme libre et aviatrice héroïque

Elle a signé l’un des plus grands exploits de l’histoire de l’aviation : la traversée de la cordillère des Andes en 1921, là où personne n’était encore passé sain et sauf, et bien avant Mermoz ou Saint-Exupéry. Fougueuse et anticonformiste, Adrienne Bolland est méconnue aujourd’hui. Le nouveau lycée de Châteauneuf-sur-Loire, dans le Loiret, portera son nom.

Elle repose discrètement à Donnery, à l’est d’Orléans. Donnery était le village de sa famille maternelle, propriétaire du château d’Allonne, et son père y acheta la propriété des Charmettes : Adrienne Bolland y passa donc une partie de sa jeunesse et y séjourna pendant la Deuxième Guerre mondiale, agente du réseau de résistance CND-Castille. Voilà pour les liens loirétains de cette aviatrice hors du commun.
Une pilote qui fut célébrée comme une héroïne en Argentine et au Chili avant de recevoir la Légion d’honneur en France, trois ans après l’exploit qui inscrivit à jamais cette passionnée de voltige dans l’histoire de l’aviation mondiale : à 25 ans, le 1er avril 1921, à bord d’un biplan Caudron G3 fait de bois et de toile et doté d’un unique moteur de seulement 80 chevaux, Adrienne Bolland traverse la cordillère des Andes de Mendoza à Santiago à plus de 4 200 mètres d’altitude. Elle dira : « Je n’avais pas de carte, je n’avais pas de compas, au pifomètre ! »

Un pari fou

Cette femme au caractère bien trempé, qualifiée par la presse française d’« irrévérencieuse », a tenu tête à son patron René Caudron, qui l’avait engagée comme pilote d’essai après l’obtention de son brevet – justement pour son audace – mais lui avait interdit de relever le défi qui lui avait été lancé en Argentine où elle effectuait des vols de démonstration. D’autres pilotes y avaient laissé leur vie, et les rares qui avaient réussi étaient passés par le sud, moins élevé.

Ce pari fou, Adrienne Bolland raconta l’avoir gagné grâce aux indications d’une mystérieuse femme spirite venue la prévenir peu avant son départ qu’à la vue d’un lac en forme d’huître, elle devrait « tourner à gauche » et faire face aux parois rocheuses qui lui sembleront infranchissables jusqu’à ce qu’une brèche apparaisse… Épuisée, frigorifiée et n’écoutant plus que son intuition, c’est cette voie improbable qui lui permit de déboucher dans la vallée de Santiago et de s’y poser après 4h15 d’un vol devenu mythique.

Femme résistante et engagée

Follement romanesque et injustement oubliée, la vie d’Adrienne Bolland se confond aussi avec l’histoire de son époque, la lutte des femmes pour conquérir leur indépendance, y compris en aidant certaines à devenir pilote, et la Deuxième Guerre mondiale, pendant laquelle elle entra dans la Résistance avec son mari Ernest Vinchon. Proche de Jean Moulin, le couple rejoint le réseau de renseignement CDN-Castille, lui à Paris, elle à Donnery où, de 1942 à 1944, elle est notamment chargée du repérage des terrains susceptibles de servir aux atterrissages et parachutages clandestins des Forces Françaises Libres.

Cinquante ans après sa mort, le 18 mars 1975, le souvenir de l’aviatrice reste intact à Donnery. Le centenaire de son exploit y a été commémoré en 2021, de même qu’en Argentine à l’ambassade de France, grâce aux reproductions de photos fournies par les Archives départementales.

Celle qui fut engagée sa vie durant dans de nombreuses luttes, dont celle de l’insertion des jeunes, savourerait que son nom soit donné à un nouveau lycée construit par la Région proche du village où elle repose. Une véritable inspiration pour les jeunes !